Oh, soirée latino !
Les formes et les courbes qui se dessinent devant moi sont fluides et généreuses, parfois
saccadées pour certains, peut-être encore un peu « débutants », harmonieusement rythmées pour d’autres, plus experts. C’est La soirée salsa de la semaine à Toulon ce 20 Janvier 2016. Une bière à la main, j’observe les couples danser sur les rythmes de la « sauce » (salsa en espagnole). Lentement j’ingurgite quelques gorgées du breuvage en m’enivrant de l’ambiance musicale sud américaine, rapportée dans ce pub au bord de mer Méditerranée. Les danseurs sur la piste paraissent extrêmement concentrés, des mouvements cadrés et travaillés à la perfection emprisonnent une partie de leur spontanéité, donnant lieux à une chorégraphie organisée et néanmoins visuellement plaisante. La musique, qui entraine mon cœur à vitesse grand V, dessine devant moi un mirage aux allure d’une jolie femme latina, irradiant la joie de vivre.
Porté par cette sensation délicate au parfum fruité, je pose ma bière sur la table et tourne la tête du coté de la vitre, où la plage me fait front : sable fin, eau bleutée, territoire verdoyant, … La chaleur est tropicale. « Quieres algo pa’ beber mi hijo ? » me lance cette serveuse au teint bronzé, indien, cheveux longs, noirs et lisses, d’un visage angélique : Cartagena, ville côtière et balnéaire sur la cote caraïbe en Colombie le 10 décembre 2011. Une brise douce et sucrée m’enveloppe, continuité de cette atmosphère caliente où je déguste lentement mon jus de papaye fraichement pressé. La soirée s ‘assaisonne par des rythmes endiablés, où chaque couple tournoie, balance d’un coté à l’autre, les tenue sont légères et frivoles, les mains se chevauchent mais ne s’attrapent pas. Elles se touchent délicatement, telles des hirondelles effleurant de leur ailes si délicates des formes sphériques invisibles. Une colombienne m’invite à danser … « Mais je ne sais pas danser ! » je lui réponds. Peu importe, ici, il n’est pas nécessaire de savoir danser pour partager un moment de salsa, ce qu’elle me fait comprendre en m’initiant tendrement au mouvement rythmique ondulatoire.
Les bras vont et viennent, mon corps se détend et se laisse aller sur le rythme des caisses claires. Je me surprends même à jouer avec les instruments annexes de cette mélodie joyeuse. Tiens, joyeuse, c’est peut être le point culminant de notre échange. Les sourires dominent la manière de faire, la « technique » ou tout autre expertise d’une « sauce » trop aseptisée. C’est l’ambiance caliente de l’Amérique du Sud, quelque part au milieu de rien, sur un territoire pimenté, sensuel, mijoté à petit feu, qui donne une saveur toute particulière à cette salsa Amigo !
Retour au calme, la musique se détend. C’est de la bachata, plus sensuelle, au corps à corps, où les bassins se déhanchent lentement mais sûrement, notamment pour les demoiselles. Un peu moins pour les messieurs, vêtus pour la plupart d’une chemise, de quelques bérets et écharpes assez fines, donnant un « style » salsero au danseur hors pair ! « Je vous sert autre chose, monsieur ? » Le barman, crâne dégarni, lunettes et accent du sud de la France, me ramène à l’instant présent, laissant s’évaporer mon souvenir d’une soirée passée à l’autre bout du monde, goutant une « salsa » qui émoustillera mes papilles gustatives pour toujours, et que je ne retrouve ici, que par la sonorité latina …
